Combustion dans l'oxygène pur

Un article du site scienceamusante.net.

Il s'agit ici de montrer la différence entre une combustion se produisant dans l'air et une combustion dans le dioxygène O2 pur. On montre aussi que le dioxygène, gaz indispensable à notre vie, serait nocif si on le respirait pur !

1 Précautions

Outre les précautions en chimie qui sont d'usage, cette expérience comporte les attentions suivantes :

  • Porter obligatoirement des lunettes de protection en cas de projection d'eau oxygénée SGH05.
  • Si la réaction de production du dioxygène SGH03 s'emballe trop vite (mousse qui monte dans le flacon), verser un peu d'eau froide pour atténuer la réaction chimique.

2 Matériel

  • Grand flacon de 2 L en Pyrex®
  • 2 bouchons en liège plus grands que l'ouverture du flacon
  • Fil de fer non galvanisé assez fin
  • Feuille de papier
  • Un bout de charbon de bois
  • Eau oxygénée H2O2 SGH05 à 110 ou 130 volumes
  • Carbonate de sodium Na2CO3 SGH07, hydrogénocarbonate de sodium NaHCO3, ou un sel de fer (III)
  • Bec Bunsen ou chalumeau à gaz
  • Baguette en bois
  • Un récipient d'eau froide
  • Un bout de pomme, de banane ou de pomme de terre

3 Protocole expérimental

Combustion d'un bout de charbon de bois dans le dioxygène pur. © O. Got, Université de Bordeaux 1.
  • Préparation du dioxygène pur SGH03 :
    • Dans le grand flacon, verser 10 mL d'eau oxygénée SGH05 à 110 ou 130 volumes.
    • Diluer en ajoutant 10 mL d'eau du robinet.
    • Ajouter deux cuillères à café de carbonate, d'hydrogénocarbonate, ou bien une pincée de sel de fer (III).
    • Poser le bouchon en liège sur l'ouverture sans fermer hermétiquement !
    • Observer un dégagement gazeux dans le flacon (qui peut mettre un certain à démarrer avec l'hydrogénocarbonate de sodium).
    • Si la production de gaz semble trop s'accélérer, verser un peu plus d'eau du robinet.
  • Pendant le dégagement gazeux, planter un bout de fil de fer d'environ 15 cm dans l'autre bouchon de liège et tordre son extrémité de manière à ce qu'on puisse y attacher un bout de charbon de bois.
  • Tester la présence du dioxygène dans le flacon :
    • Enflammer le bout de la baguette en bois puis éteindre la flamme en ne laissant qu'un point incandescent.
    • Soulever le bouchon de liège et introduire la baguette incandescente dans le flacon.
    • Si celle-ci se rallume et donne une flamme, alors le flacon contient bien une grande quantité de dioxygène.
    • Sinon, attendre quelques minutes de plus.
  • Lorsque le flacon est rempli de dioxygène :
    • Fixer un bout de charbon de bois (qui doit être plus petit que le goulot du flacon !) sur le fil de fer.
    • À l'aide du bec Bunsen, produire un point d'incandescence sur le charbon.
    • Introduire le charbon dans le flacon et observer sa combustion, bien plus lumineuse et rapide que dans l'air.
    • S'il reste assez de dioxygène dans le flacon (test de la baguette incandescente), on peut essayer de même avec un bout de papier enflammé. Celui-ci se consume en une seconde.
    • On peut parfois observer que le fil de fer rougit et s'enflamme dans le dioxygène pur. Des billes de fer en fusion tombent au fond du flacon. Il peut même se consumer en entier !

4 Explications

  • L'eau oxygénée H2O2 peut libérer son oxygène en étant oxydée par un autre produit, par exemple :
    • avec les ions carbonate et hydrogénocarbonate, via l'ion peroxocarbonate[1] :
CO32–(aq) + H2O2(aq) → CO42–(aq) + H2O
CO42–(aq) + H2O2(aq) → CO32–(aq) + H2O + O2(g)
    • avec un sel de fer (III) :
Fe3+(aq) + e → Fe2+(aq) ; E0 = 0,77 V
O2(g) + 2 H+(aq) + 2 e → H2O2(aq) ; E0 = 0,69 V
H2O2(aq) + 2 Fe2+(aq) → O2(g) + 2 H+(aq) + 2 Fe3+(aq)
Mais aussi par irradiation aux rayons ultra-violets ou par chauffage :
2 H2O2(aq) → O2(g) + 2 H2O
C'est une molécule fragile, aussi très réactive et que l'on rencontre dans d'autres expériences (le panache de brouillard par exemple).
  • Le dégagement gazeux initial est donc bien du dioxygène pur. En effet, celui-ci est extrêmement réactif et permet de ranimer une flamme éteinte, par exemple sur un bout de bois incandescent : c'est un comburant, signalé par le pictogramme SGH03. L'air contient environ 20% de dioxygène, ce qui est bien suffisant pour que nous puissions respirer. S'il contenait plus de dioxygène, nous aurions les poumons brûlés par son attaque et la moindre combustion s'effectuerait de manière beaucoup plus vive.
  • En remplissant le flacon, le dioxygène chasse l'air (et donc les 80% de diazote qu'il contient et les traces d'autres gaz) et nous approchons des 100% de dioxygène.
  • Le charbon de bois se consume très rapidement tant qu'il y a assez de dioxygène dans le flacon. La combustion dégage du dioxyde de carbone CO2, qui n'est pas un comburant dans ce contexte, donc étouffe la flamme au final. (Voir combustion : le triangle du feu.)
  • Le fil de fer, qui est pourtant un métal en masse, peut donner une combustion. Dans les étincelles, nous avons vu qu'il fallait au moins le réduire en poudre pour qu'il puisse se consumer dans l'air. Dans 100% de dioxygène, la combustion peut avoir lieu, même sous forme de fil.
  • Pour le papier aussi, la combustion est violente et ne dure qu'un instant.
  • Il est connu que si le pourcentage de dioxygène dans l'air était supérieur à 20%, les feux de forêts seraient beaucoup plus fréquents et dévastateurs. Le dioxygène, s'il est indispensable à notre vie sur Terre, n'en reste pas moins un gaz très réactif par son pouvoir oxydant. La molécule O2 entre dans la catégorie des radicaux : deux électrons de cette molécule sont célibataires (couches électroniques ouvertes) ce qui explique sa grande réactivité. Voir l'expérience sur le paramagnétisme du dioxygène.
  • On peut se rendre compte de sa vive action en laissant à l'air libre un bout de pomme, de banane ou de pomme de terre. La chair se noircit sous l'action du dioxygène de l'air. Plongés dans le flacon, les fruits noirciraient très rapidement ! De l'huile ou une plaque de beurre laissée à l'air libre devient rance sous son action (odeur désagréable, changement de couleur). Son action sur notre peau conduit à la formation de radicaux libres, des espèces chimiques très réactives qui peuvent nous irriter. Pour résister à son action oxydante, les aliments que l'on achète contiennent souvent des agents antioxydants (acides ascorbique, citrique : un filet de jus de citron ou d'orange empêche les fruits de noircir). Les crèmes de beauté à la mode contiennent aussi tout un tas d'antioxydants pour nous préserver des radicaux...
  • On peut montrer le pouvoir oxydant du dioxygène même lorsqu'il est liquide, c'est à dire à très basse température. Pour cela consulter l'expérience de distillation cryogénique du dioxygène.

5 En savoir plus

  • L'oxygène peut aussi exister sous une autre forme que O2 : l'ozone SGH03SGH06SGH08 est un gaz ayant pour formule O3 et c'est aussi un gaz extrêmement réactif, irritant et toxique pour les animaux (que nous sommes !) et les plantes, sauf bien sûr lorsqu'il se trouve dans la haute atmosphère, loin de nous, dans sa couche d'ozone...
  • Pour réaliser une autre expérience facile à réaliser avec un gaz comburant, consulter : Le protoxyde d'azote : un gaz comburant

6 Vidéo

7 Références

  1. On the decomposition of hydrogen peroxide via the peroxocarbonic acid anion, H. U. Suess et al., TAPPSA Journal[1]